Les idées anthropologiques des philosophes du Siècle des Lumières

The author, having examined the distinction we make to-day between ethnocentrism (cultural superiority), general amongst ail peoples, and racism (biological superiority), such as we know it, for example, right from the Spanish Renaissance, in the " Pure Blood " Statutes, brings to mind the...

Full description

Bibliographic Details
Published in:Revue française d'histoire d'outre-mer
Format: Article in Journal/Newspaper
Language:French
Published: PERSEE 1971
Subjects:
Online Access:http://www.persee.fr/doc/outre_0300-9513_1971_num_58_212_1544
https://doi.org/10.3406/outre.1971.1544
Description
Summary:The author, having examined the distinction we make to-day between ethnocentrism (cultural superiority), general amongst ail peoples, and racism (biological superiority), such as we know it, for example, right from the Spanish Renaissance, in the " Pure Blood " Statutes, brings to mind the struggle between the monogenetic idea (mankind descends from a single pair of ancestors), a Biblical thème revived by the Puritan John Ray and acknowledged by Buffon, and the polygenetic theory (White man, Negroes, Lapps have independent ancestors) considered more scientific by some (Giordano Bruno, Isaac La Peyrère, Voltaire, Goethe). On the other hand, the psycho-analytical approach gives way to the specificity of anti-semitism (the Jews, a people whose laws are oppressive, symbolize the father) with regards to anti-Negro racism (the Negroes, descended from the ape, symbolize animality). The author then reviews the main thinkers of the Age of Enlightenment. Maupertuis maintains that the colour of the Negroes is an accidental variation of the original white strain he suggests that some experiments be made in vivo to demonstrate this proposition and many others affecting the improvement of the race. Buffon, who situâtes the birth of civilization in India, still without denying the oneness of mankind, considers that the " degeneration " of the Negroes and the Lapps, because of the climate, would take centuries to be reabsorbed. Montesquieu praises the Nordic races who benefit from a cold climate : under the tropics, slave labor is inevitable but it would be advisable none the less to attempt the civilization of Africa through industry and commerce as for the Jews, Montesquieu stands openly in their defense. Rousseau, the apostle of " anti- civilization ", the upholder of the " good savage ", is fundamentally anti-racist, as an exceptional case, and pro-Jewish, even Sionist to the last word. Diderot, who represents an average opinion, is himself convinced that the " coloured races ", whether Lapps or Tahitians, for instance, are self-conscious about their inferiority. Lastly, for Voltaire, the Negroes are born-slaves, bordering animality, from which they are not entirely severed but it is above ail against the Jews that he lets forth : the author suggests several possible reasons for this, both in Voltaire's life as an unscrupulous businessman, as in his striving to found a new " deistic religion ". Après avoir examiné la distinction faite aujourd'hui entre l'ethnocentrisme (supériorité culturelle), général chez tous les peuples, et le racisme proprement dit (supériorité biologique), tel qu'on le voit par exemple dès la Renaissance espagnole dans les « Statuts de pureté du sang », l'auteur rappelle la lutte entre l'idée monogéniste (tous les hommes descendent d'un ancêtre commun), thèse biblique reprise par le puritain John Ray et par Buffon, et la théorie polygéniste (l'homme blanc ne saurait avoir le même ancêtre que les Noirs ou les Lapons), jugée plus « scientifique » par certains (Giordano Bruno, Isaac La Peyrère, Voltaire, Goethe). D'autre part, l'approche psychanalytique permet de souligner la spécificité de (les Juifs, peuple de la loi oppressive, symbolisent le père), à l'égard du racisme anti-Noir (les Nègres, descendants du singe, symbolisent l'animalité). L'auteur passe ensuite en revue les principaux penseurs du Siècle des Lumières. Maupertuis considère que la couleur des Nègres est une variante accidentelle du blanc originel il suggère des expériences à faire in vivo pour démontrer cette proposition et bien d'autres, touchant à l'amélioration de la race. Buffon, qui place en Inde la naissance de la civilisation, sans nier l'unité de l'espèce humaine, pense que la « dégénération » des Nègres et des Lapons, due au climat, prendrait des siècles pour se résorber. Montesquieu vante les races du Nord, qui jouissent du bénéfique climat froid : sous les tropiques, le travail forcé est inévitable mais il n'en faudrait pas moins essayer de civiliser l'Afrique par le commerce et l'industrie quant aux Juifs, Montesquieu se fait ouvertement leur défenseur. Rousseau, l'apôtre de 1' « anti-civilisation », le chantre du bon sauvage, est fondamentale ment anti-raciste, cas exceptionnel, et pro-juif, voire sioniste avant la lettre. Diderot, qui représente l'opinion moyenne, est lui convaincu que l'infériorité des races « de couleur » est ressentie par elles-mêmes, Lapons ou Tahitiens, par exemple. Pour Voltaire enfin, les Nègres sont des esclaves-nés, proches de l'animalité, dont ils ne sont pas entièrement coupés mais c'est surtout contre les Juifs qu'il se déchaîne : l'auteur indique plusieurs sources de cet antisémitisme, dans sa vie d'homme d'affaires peu scrupuleux ou dans son action de fondateur d'une nouvelle « religion déiste ».