Summary: | Évoquer l'existence d'une dimension autochtone de la fiscalité sur le territoire de la République française peut de prime abord surprendre. La notion de fiscalité autochtone semble en effet réservée à d'autres contrées. Au Canada notamment, la Constitution reconnaît trois groupes de peuples autochtones, les Indiens (ou Premières Nations), les Métis et les Inuit, qui peuvent bénéficier d'un régime fiscal dérogatoire au droit commun. Ainsi, les Premières Nations possèdent des territoires quasi-autonomes nommés réserves, sous juridiction fédérale, au sein desquels sont accordées de larges exemptions d'impôts et taxes. Le Canada est cependant un État fédéral, où multiculturalisme et communautarisme tiennent une place importante. La France est en revanche un État unitaire, gouverné par le principe d'indivisibilité de la République visé à l'article 2 de la Constitution. C'est notamment sur le fondement de ce principe que le Conseil constitutionnel a censuré les dispositions de la loi portant statut de la collectivité territoriale de Corse qui faisaient mention du « peuple corse, composante du peuple français » 1. Le Conseil constitutionnel avait considéré alors que la Constitution ne connaissait que le peuple français, composé de tous les citoyens français sans distinction d'origine, de race ou de religion 2. Au plan fiscal, le principe d'égalité exclut en principe de définir sur le territoire de la République un régime spécifique à certaines populations, en raison de leur origine. Pour autant, des exceptions existent au sein de la République. Notamment, une population, la population autochtone de Nouvelle-Calédonie, a été assujettie à un régime fiscal d'exception et à une fiscalité dérogatoire au droit commun, peu de temps après la prise de possession de son territoire par la France en 1853. Ce régime fiscal d'exception, imposé durant la période coloniale, va disparaître avec l'accession de la Nouvelle-Calédonie au statut de territoire d'outre-mer. L'application à la population autochtone de règles fiscales dérogatoires au droit commun va cependant * Maître de conférences en droit public, Aix-Marseille Université, Centre d'Études Fiscales et Financières (CEFF-EA 891).
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