Józef Morozewicz (1865-1941)

Parmi les noms des pétrographes polonais, connus dans le monde savant, celui de Joseph Morozewicz occupe une place d’honneur, Tout d’abord, il s’est rendu célèbre, aux années 1891—1895, surtout par ses études synthétiques sur les minéraux et les roches, tant au point de vue des méthodes appliquées,...

Full description

Bibliographic Details
Main Author: Małkowski, Stanisław
Format: Article in Journal/Newspaper
Language:English
Published: Annales Societatis Geologorum Poloniae 2003
Subjects:
Online Access:https://gq.pgi.gov.pl/asgp/article/view/11016
Description
Summary:Parmi les noms des pétrographes polonais, connus dans le monde savant, celui de Joseph Morozewicz occupe une place d’honneur, Tout d’abord, il s’est rendu célèbre, aux années 1891—1895, surtout par ses études synthétiques sur les minéraux et les roches, tant au point de vue des méthodes appliquées, qu’à celui des résultats acquis. Le nom de J. Morozewicz figure également parmi ceux des savants polonais tels que A. Czekanowski, J. Czerski, K. Bohdanowicz, L. Jaczewski et d’autres, qui ont grandement contribué à l’enrichissement de la connaissance des minéraux, des roches et de la structure géologique des vastes étendues de l’empire de Russie. La Novaja Zemlja, l’Oural, les Steppes de Noghay, les Iles de Commandeur — voilà les terrains principaux des voyages et des travaux d’exploration de Morozewicz. Le bagage scientifique de J. Morozewicz est consigné dans la liste de ses ouvrages et articles publiés, placée à la fin du texte polonaisa que nous résumons ici. Jetons un coup d’oeil sur certains résultats de ses recherches. Les synthèses de minéraux, obtenues par J. Morozewicz dans les fourneaux de la verrerie de Targówek près Varsovie, étaient imposantes par l’échelle de grosseur des alliages certains de ceux-ci pesaient jusqu’à 50 kg, leur cristallisation durait parfois jusqu’à deux mois. Grâce à ces circonstances, J. Morozewicz obtenait des minéraux synthétiques en grandes quantités et en cristaux de grosseur suffisante (certains d’entre eux mesuraient plus de 1,5 mm de longueur) pour pouvoir les isoler facilement et les étudier avec les méthodes appliquées d’habitude aux roches, sans se borner seulement aux déterminations qualitatives. Les analyses chimiques des minéraux dégagés des alliages formaient la base des recherches sur l’influence de la température et de la composition du fondage, variées à dessein, sur le chimisme du processus de sa cristallisation. En dehors des procédés chimiques, les méthodes optico-microscopiques y furent largement appliquées. Quant à l’ordre de la cristallisation des minéraux du fondage, J. Morozewicz a fait une série d’observations, établissant que l’influence décisive sur la consécutivité de la cristallisation des minéraux du magma fut exercée par les rapports quantitatifs des éléments contenus dans le fondage et que, par conséquent, cette consécutivité n’est pas uniquement déterminée par le point de fusibilité des composants (comme l’admettaient F. Fouqué et M. Lévy) ou par le degré de basicité des silicates (selon l’opinion de H. Rosenbusch). Les résultats des synthèses de J. Morozewicz forment une des bases d’un courant nouveau dans l’étude de la pétrogenèse qui, grâce aux travaux de Vogt et, ensuite, des savants américains et autres, introduisit la pétrographie des roches éruptives dans sa période physicochimique. J. Morozewicz fut le premier à obtenir les basaltes synthétiques suivants: basaltes à néphéline, à haüyne, à melitite, ainsi que liparitev dans la masse vitreuse de laquelle on trouve de petits cristaux de quartz, de biotite et de sanidine. C’était la première synthèse pétrographique, où ces trois composants ont cristallisé ensemble. En outre, parmi les nombreuses synthèses de minéraux réalisées par J. Morozewicz, les suivantes méritent une attention spéciale: corindon, silimanite, cordiérite, enstatite, augite, haüyne et sodalite. Bien intéressante aussi est la synthèse du grenat de soude, obtenue dans un mélange isomorphe avec le grossulaire, que J. Morozewicz nomma lagoriolite en l’honneur de son maitre, le professeur A. Lagorio, minéralogue et pétrographe distingué. En 1896, J. Morozewicz prit pars à l’expédition scientifique à la Novaja Zemlja. Cette expédition, dirigée par T. Tchernicheff, le géologue russe bien connu, avait principalement pour bur de recueillir des specimens géologiques et paléontologiques dans la zone littorale le long du détroit de Matotchkin Char. C’était le premier grand voyage de J. Morozewicz, inaugurant le cycle de ses expéditions en Russie d’Europe et d’Asie. En 1897, J. Morozewicz, forcé par le gouvernement tsariste à quitter la Pologne, prit le poste de géologue du Comité Géologique de Saint-Pétersbourg qu’il occupa pendant sept ans c’est-à-dire jusqu’à 1904. L’Oural fut l’un des premiers terrains de recherches de J. Morozewicz en sa qualité de géologue d’Etat au service de la Russie. A ce terrain sont consacrés ses rapports sur les recherches le long du chemin de fer Ekaterinbourg-Tchélabinsk et ses études sur les gisements de magnétite dans la Mt. Magnitnaja. Le résultat de son voyage à l’Oural fut, entre autres, d’avoir distingué une roche, nouvelle dans le classement pétrographique, qu’il appela kyschtymite et qui représente un produit, inconnu jusqu’alors, de la cristallisation du magma saturé de l’oxyde d’aluminium; ses composants principaux sont: corindon, anortbdte, biotite; secondaires: spinelle, zircon, apatite. La kyschtymite fut de .même reproduite synthétiquement par Morozewicz. Un autre terrain des travaux étendus et bien fructueux de Morozewicz furent, aux années 1898—1901, les steppes de Noghay sur la Mer d’Azov. J. Morozewicz publia en 1929, sous le titre de «La Mariupolite et ses parents» (Travaux du Service Géologique de Pologne, vol. II, livr. 3), le travail le plus important parmi ceux qu’il a consacrés à ce terrain. Morozewicz introduisit dans la pétrographie la dénomination de «mariupoüte» en 1902, désignant par ce nom le chaînon extrême des syénites à néphéline, composé principalement d’albite, de néphéline et d’aegyrine, et dépourvu, dans son type pur, de feldspath potassique. Les recherches ultérieures ont amené J. Morozewicz à constater qu’il existe tout un groupe de roches apparentées à la mariupolite, fort singulières par leur composition minérale et par leur structure variable, .parfois très étrange. Ainsi, par exemple, il existe des variétés de mariupolite dans lesquelles on constate la présence, comme phénocristaux, des zircons et des magnétites fort bien formés. Les minéraux accessoires -des mariupolites sont parfois les sodalites et les cancrinites, ainsi que les lépidomélanes et les beckelites (silicate du calcium, abondant en terres rares du groupe de cérium, découvert et décrit par J. Morozewicz) et d’autres. La mariupolite à beckelite est, selon Morozewicz, la plus belle parmi les roches qu’il réussit à découvrir et à connaitre. J. Morozewicz en a extrait la beckelite en quantité suffisante pour faire des analyses et des déterminations; il établit aussi, d’après elle, une méthode spéciale pour dégager les terres rares des mariupolites et des roches apparentées. En dehors des mariupolites, J. Morozewicz étudia et décrivit d’autres groupes de roches, paraissant à proximité et comagmatiques avec elles, comme, par exemple,oe les foyaites, syénites alcalines, pyroxénites et d’autres. Des minéraux composant les foyaites et les syénites alcalines, ainsi que les pégmatites, associées aux mariupolites, Morozewicz isola deux variétés particulières d’amphiboles ferro-alcalines il donna à l’une d’elles le nom de taramite (tiré de celui du torrent Wali- Tarama) et à l’autre, moins ferreuse que la taramite, mais plus riche en silice, alcalis et fluoré, celui du fluotaramite. En 1903, Morozewicz dirigea, de la part du Comité Géologique de Saint-Pétersbourg, une expédition scientifique aux Iles de Commandeur (littoral nord-ouest du Pacifique). Les résultats de cette expédition, publiés en une série de communications et de mémoires de Morozewicz et de ses collaborateurs, furent ensuite réunis et édités sous une forme d’une belle monographie en langue polonaise (Komandory, Warszawa 1925). Le principal objectif de cette expédition fut l’examen du gisement de cuivre natif, existant dans ces Iles. Cette tache fut accomplie d’une façon approfondie et minutieuse d’après l’étude minéralogico-chimique et microscopique des roches composant les Iles. Les études de terrain et les études analytiques furent complétées par des travaux de laboratoire, ayant pour éut de reproduire synthétiquement le cuivre natif dans des conditions analogues à celles qui pouvaient exister au moment de la formation du gisement étudié par Morozewicz. Ces expériences qui reproduisaient dans une certaine mesure celles des savants américains M. N. Stokes et G. Fernekes, furent en même temps leur complément. Morozewicz démontra d’une manière peremptoire que les gisements du cuivre natif dans la paragenèse de la calcite, des zeolites et du quartz, tels que les gisements américains célebres de Lake Superior, Douglas County, Isle Royal et autres, avec ceux des Iles de Commandeur, se sont formés comme résultat du processus de sécrétion latérale et du dépôt du cuivre des solutions hydro-thermales sous l’influence de l’action réduisante des sels du fer et du cuivre dans un milieu basique. Il convient aussi de mentionner ici la zéolite nouvelle (Ca Al(2)Si(7)O(8) H(2)O), découverte et étudiée aux Iles de Commandeur par Morozewicz, qui lui a donné le nom de stellerite. Rapportées de cette expédition, les collections pétrographiques intéressantes (étudiées, ainsi que le cuivre natif et les minéraux qui l’accompagnent, à l’institut de Minéralogie et de Pétrographie de l’Université Jagellonienne à Cracovie) ont établi que les Iles de Commandeur appartiennent à la province pétrographique nord-américaine, bien que sous le rapport tectonique elles paraissent être liées au littoral asiatique du Pacifique. Les mérites de J. Morozewicz dans la pétrographie de la Pologne et des terrains limitrophes le distinguent parmi les autres pétrographes polonais. Les Monts de Tatra la Volhynie les abords de Pieniny, les Monts de Sainte-Croix, ce sont les terrains de ses recherches personnelles; les mêmes régions, et la Slovaquie en plus, sont ceux de recherches de ses élèves, inspirées par lui. La création d’un moderne Institut d’Université, consacré à la minéralogie et à la pétrographie, et la fondation d’une école pétrographique, la première en Pologne (1904—1918), ont animé et élevé à un niveau convenable notre mouvement scientifique dans ce domaine. Enfin, la préparation et la publication des manuels et de livres d’étude, pour la jeunesse polonaise étudiant les sciences de la Terre, c’était sa tâche résultant du sentiment civique, profondement ancré dans son âme, du devoir de fortifier la civilisation nationale à l’époque, quand le pays fut privé de son indépendance. C’est à lui, comme organisateur le plus éminent en Pologne des travaux scientifiques dans le domaine des sciences de la Terre, que l’ont a confié, au moment ou apparut la possibiüté d’améliorer la situation politique du pays, l’organisation de l’Académie des Mines à Cracovie et, ensuite, en Pologne enfin indépendante, celle de l’institut Géologique de Pologne à Varsovie. Les années 1919—1931 c’est la derniere période du travail scientifique et organisatrice de Morozewicz, qui, à son poste de créateur et de directeur de la principale institution géologique polonaise, en a jeté les fondations, réunit les travailleurs, mit en marche les ateliers scientifiques, représenta cette science et l’État polonais à l’étranger et, enfin, éleva pour l’institut Géologique de Pologne un édifice monumental, bien qu’il eut à vaincre sur son chemin d’immenses obstacles et difficultés. Józef Morozewicz mourut à Varsovie le 12 Juin 1941, dans la seconde année de l’occupation allemande.