Les statues mangent aussi. Repenser la conservation-restauration

International audience Dans cet article, j’aimerais discuter cette opposition entre conservation des biens culturels dans les musées et destruction des objets par les peuples autochtones. Qui conserve et qui détruit ? Que signifient ces termes ? J’utiliserai ici les termes « conservation-restauratio...

Full description

Bibliographic Details
Main Author: Etienne, Noémie
Other Authors: University of Bern, Fondation des maisons des sciences de l'homme (FMSH), Projet de recherche : Trouble dans les collections. Trajectoires d’idées, de savoirs et d’objets entre musées en Europe et en Afrique (2020-2021)»
Format: Article in Journal/Newspaper
Language:French
Published: HAL CCSD 2021
Subjects:
Online Access:https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-03404265
https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-03404265/document
https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-03404265/file/Etienne_Trouble2.pdf
Description
Summary:International audience Dans cet article, j’aimerais discuter cette opposition entre conservation des biens culturels dans les musées et destruction des objets par les peuples autochtones. Qui conserve et qui détruit ? Que signifient ces termes ? J’utiliserai ici les termes « conservation-restauration » pour parler de l’activité contemporaine telle qu’elle est pratiquée dans les musées en Europe et aux Etats-Unis, c’est-à-dire un mélange de préservation (une approche tournée vers une modification minimale et une stabilisation des objets, incluant la conservation curative et préventive) et de restauration (une pratique plus invasive modifiant la matérialité des artefacts). Je privilégie le terme de conservation, entendu au sens large, pour parler d’un ensemble de pratiques techniques et culturelles destinées à préserver et éventuellement à présenter les œuvres. A mon sens, la conservation est toxique lorsqu’elle s’oppose aux attentes des producteur.rices des artefacts ainsi qu’au bien-être des objets. La conservatrice-restauratrice canadienne Miriam Clavir a effectué un travail fondamental, mettant en évidence les différentes conceptions de la conservation dans le cadre de son travail au Musée d’Anthropologie de Vancouver, B.C. Plusieurs pages de son livre (2002) organisent les informations sous la forme d’un tableau opposant, sur la colonne de gauche, les « croyances et valeurs » des musées à celles des Premières Nations, sur la colonne de droite. Cette mise en page suggère d’emblée l’existence de valeurs distinctes, opposées et partagées par les différents groupes. Le terme de « valeurs » même reprend le cadre théorique proposé par l’historien d’art autrichien Alois Riegl en 1903, suivant lequel chaque groupe culturel aurait des attentes souvent antagonistes qui expliqueraient les conflits en matière de conservation-restauration. Pourtant, il importe de dépasser ces antagonismes et de restituer la complexité des positions, pour repenser collectivement le concept même de conservation.