Pollution et limites des corps : échelle des perturbations endocriniennes, genre et recours au droit par une communauté amérindienne du Canada

À partir de l’exemple du déséquilibre du sex-ratio des membres de la communauté indienne des Aamjiwnaang, une des Premières Nations du Canada qui aient été exposées à une pollution chimique chronique, cet article analyse les possibilités, au niveau individuel comme collectif, que le droit canadien r...

Full description

Bibliographic Details
Main Author: Scott, Dayna Nadine
Language:French
Published: 2016
Subjects:
Online Access:https://www.cairn.info/article.php?ID_ARTICLE=SSS_343_0077
Description
Summary:À partir de l’exemple du déséquilibre du sex-ratio des membres de la communauté indienne des Aamjiwnaang, une des Premières Nations du Canada qui aient été exposées à une pollution chimique chronique, cet article analyse les possibilités, au niveau individuel comme collectif, que le droit canadien relatif aux délits civils peut offrir en matière de préjudices résultant d’un phénomène de perturbation endocrinienne. Ce cas d’école montre à quel point il est difficile de démontrer l’existence d’un dommage ou d’un préjudice juridique dans des situations d’exposition chronique massive à des polluants ayant des effets de perturbations endocriniennes sur plusieurs générations. Ces difficultés tiennent non seulement à la nature probabiliste des liens entre substances et effets, à l’échelle et à la durée du phénomène, à la légalité des pollutions à faibles doses mais aussi et surtout au fait que le droit des délits est imprégné par la notion de sujet individuel et par une vision des corps centrée sur la personne. L’article interroge la propension du mouvement pour la justice environnementale à concevoir les dommages à partir d’hypothèses implicites et fortement discutables sur ce que signifient le naturel et le normal en matière de biologie des hormones. Il propose une lecture critique des catégories utilisables dans le cadre d’actions en justice (coups et blessures, nuisance, négligence.), lecture fondée sur la théorie féministe et la notion de communauté, laquelle est inséparable du contexte social et politique des expositions et aussi, dans le cas des premières nations amérindiennes, de leur histoire coloniale. Pollution and the limits of bodies : scale of endocrine perturbations, gender and litigation in a Canadian First NationFocusing on the case of sex-ratio unbalance in the Aamjiwnaang community – one of the Canadian First Nations whose exposition to chemical pollution has been chronic, this paper analyzes the resources Canadian tort law offers to the victims of disorders originating in endocrine disruptions both individually and collectively. This emblematic case shows how difficult is the demonstration of tort when exposure is multiple, massive and affecting several generations. This difficulty is rooted in the probabilistic nature of the relationship between the substances and their adverse effects, in issues of scale and duration, in the legally problematic nature of low dose pollution. Both the centrality given to the category of person in tort laws and their highly individual understanding of the body however operate as major hindrances. This paper questions the propensity of environmental justice movements at conceiving torts on the basis of problematic notions of what is natural and normal in hormonal regulations. It offers a critical reading of the various categories (wounds, nuisances, neglect.) that shape litigation, mobilizing feminist theory and a concept of community taking into account the social and political context of exposure as well as the colonial history of Canadian First Nations. A partir del ejemplo del desequilibrio en la proporción de sexos de los miembros de la comunidad indígena de los Aamjiwnaang – una de las Primeras Naciones de Canadá – que han sido expuestos a una contaminación química crónica, este articulo analiza las posibilidades, tanto a nivel individual como colectivo, que el derecho canadiense relativo a los delitos civiles puede proporcionar en materia de daños derivados de un fenómeno de alteraciones endocrinas. Este estudio de caso muestra lo difícil que es demostrar la existencia de lesiones o daños jurídicos en casos de exposición crónica y masiva a contaminantes con efectos de alteración endocrina sobre varias generaciones. Estas dificultades no solo se refieren a la naturaleza probabilística de la relación entre sustancias y efectos, a la magnitud y duración del fenómeno o a la legalidad de la contaminación a baja escala, sino que además y sobre todo se refieren al hecho de que el derecho de daños está penetrado por la noción de sujeto individual y una visión de los cuerpos que se centran en las personas. El artículo examina la propensión del movimiento por la justicia ambiental en entender los daños a partir de supuestos implícitos y altamente cuestionables acerca del significado de lo natural y lo normal en materia de biología de las hormonas. Se ofrece una lectura crítica de las categorías utilizadas en el contexto de la acción judicial (golpes y lesiones, perjuicios, negligencia, etc.), con una lectura basada sobre la teoría feminista y el concepto de comunidad, el cual es inseparable del contexto social y político de estas exposiciones, pero también en el caso de las Primeras Naciones amerindias, de su historia colonial.