La Cour itinérante au nord du 49e parallèle : un espace de négociations politiques sur l’autodétermination judiciaire autochtone entre le Québec et les communautés cries et inuit (1970-1989)

En octobre 1974, dans le contexte de la crise de la Baie James, le gouvernement de Robert Bourassa crée le premier tribunal itinérant chargé de rendre les services judiciaires accessibles à la population résidante au nord du 49e parallèle du Québec. Depuis, la Cour itinérante du district judiciaire...

Full description

Bibliographic Details
Main Author: Desruisseaux, Caroline
Other Authors: Bienvenue, Louise, Gélinas, Claude
Format: Other/Unknown Material
Language:French
Published: Université de Sherbrooke 2018
Subjects:
Online Access:http://hdl.handle.net/11143/14456
Description
Summary:En octobre 1974, dans le contexte de la crise de la Baie James, le gouvernement de Robert Bourassa crée le premier tribunal itinérant chargé de rendre les services judiciaires accessibles à la population résidante au nord du 49e parallèle du Québec. Depuis, la Cour itinérante du district judiciaire d’Abitibi est amenée à se rendre notamment dans les communautés cries et inuit pour résoudre des litiges juridiques. Or, dès sa mise en œuvre, le système judiciaire s’avère inadapté, inefficace et de plus en plus illégitime aux yeux des populations autochtones nordiques. Face à cette réalité, les administrations régionales et les municipalités cries et inuit entreprennent des démarches en vue de reprendre en charge la justice communautaire dans une perspective de revalorisation identitaire, de revitalisation culturelle et d’autodétermination politique. Dans le cadre de ce mémoire de maîtrise, nous observons les négociations menées entre les gouvernements régionaux et les conseils municipaux cris et inuit, les membres de la Cour itinérante, le ministère de la Justice et le Conseil des ministres de Robert Bourassa au cours des années 1970 et 1980. En effet, à partir d’un fonds d’archives privé regroupant l’ensemble des documents de travail du juge coordonnateur de la Cour itinérante, Jean-Charles Coutu, nous analysons la posture adoptée par les membres de l’administration judiciaire à l’égard des revendications des dirigeants cris et inuit au moment de la mise en œuvre du système judiciaire. Le cadre temporel de l’analyse est circonscrit entre l’élaboration des principes sous-jacents au système judiciaire nordique (1970) et le premier projet de réforme de cette approche (1989). Alors que l’historiographie actuelle observe le rapport entre les leaders autochtones et les membres de la fonction publique en mettant en évidence leurs divergences, les sources à l’étude nous permettent de nuancer notre compréhension de la situation. En effet, suivant les discussions initiées par les autorités cries et inuit, nous constatons que Jean-Charles Coutu et quelques autres membres de l’administration judiciaire ont mis à profit leur position d’intermédiaire pour contribuer à l’aménagement d’un espace de négociation avec le ministère de la Justice et le Conseil des ministres de Robert Bourassa. Tout en étant limités par leur devoir de réserve, plusieurs fonctionnaires rattachés à la Cour itinérante ont cherché à faciliter le transfert de certains pouvoirs judiciaires à des comités de justice locaux en vue de mieux adapter la procédure à la réalité des peuples autochtones. Bien que ces négociations aient donné peu de résultats observables au sein des communautés cries et inuit au sortir de la décennie, elles restent significatives dans la mesure où elles ont façonné la première politique d’intervention de l’appareil judiciaire en milieu autochtone au Québec (1989).