Summary: | L’Arctique, bien que région éloignée de toutes activités anthropiques intensives, est contaminé par les polluants émis à de plus basses latitudes. En effet, les caractéristiques physico-chimiques de certains polluants leur permettent d’être transportés sur de longues distances, via les courants atmosphériques ou océaniques. Parmi eux se trouve notamment le mercure (Hg), élément trace non-essentiel naturellement émis dans l’environnement mais dont les émissions d’origine anthropiques ont fortement augmenté depuis le 19ème siècle. Ce neurotoxique engendre chez les espèces animales des troubles comportementaux, mais aussi des problèmes de reproduction et dans les cas extrêmes, la mort. Le milieu marin est particulièrement sensible à la contamination au Hg. En effet, une fois dans l’environnement marin, le Hg intègre la chaine alimentaire (sous sa forme toxique méthylée - MeHg), dans laquelle sa concentration augmente d’un niveau trophique à l’autre (processus de bioamplification) et/ou accumule au sein des organismes (processus de bioaccumulation). Ainsi, les prédateurs supérieurs longévifs tels que les oiseaux marins, en fin de chaine alimentaire, présentent les concentrations de Hg parmi les plus élevées. Ils sont largement et efficacement utilisés comme bio-indicateurs de la contamination au Hg de leur environnement. La majeure partie des connaissances actuelle sur la contamination au Hg des oiseaux marins Arctique concerne la saison de reproduction, durant laquelle les concentrations varient spatialement, avec notamment les concentrations les plus élevées trouvées en Arctique Canadien. Durant cette période, qui ne représente qu’une partie de l’année, les oiseaux se reproduisent à terre et sont donc plus facilement accessibles. Mais une fois la saison de reproduction terminée, la majorité des oiseaux marins migrent en haute mer, en dehors de l’Arctique. Une étude précédente a montré qu’une population de mergules nains (Alle alle) se reproduisant à l’Est du Groenland a des concentrations de Hg plus élevées en période de non-reproduction qu’en période de reproduction, avec des effets délétères sur la reproduction suivante. Au cours de ce travail de thèse, et grâce à une approche multi espèces et multi colonies, nous nous sommes intéressés au rôle de la migration des oiseaux marins sur leur contamination au Hg et ce à l’échelle de l’Arctique. Nos résultats montrent une saisonnalité dans la contamination au Hg, nous permettant d’étendre les résultats mis en avant pour les mergules nains à de nombreuses autres espèces d’oiseaux marins. Nous avons également trouvé que cette saisonnalité varie spatialement avec des variations saisonnières plus importantes pour les populations se reproduisant en Atlantique Ouest (Ouest du Groenland et Est du Canada). Ces résultats nous ont amenés à faire l’hypothèse que cette variation était une conséquence de la migration des oiseaux marins et de la distribution de leur zone d’hivernage. Pour tester cette hypothèse, nous avons utilisé les oiseaux comme bio-indicateurs de leur environnement. Pour cela, nous avons combiné des analyses de Hg avec du biologging afin de retracer l’origine spatiale de la contamination hivernale au Hg. Nos résultats montrent une augmentation des concentrations de Hg suivant un gradient est-ouest nous permettant ainsi d’étendre les résultats des précédentes études concernant la période de reproduction à l’hiver et à l’ensemble des régions marines à l’échelle de l’Atlantique Nord - Arctique. Ainsi, les résultats du présent travail de thèse nous permettent de conclure qu’au-delà de leur migration, ce sont les zones de reproduction et d’hivernages des oiseaux marins arctiques qui conditionnent leur contamination au Hg. The Arctic, even far from intensive human activities, is contaminated by pollutants emitted at Northern mid-latitudes. Because of their physico-chemical characteristics, pollutants are transported over large distances through atmospheric or oceanic currents. Among them is mercury (Hg), a naturally occurring and non-essential trace element whose emissions increased since the 19th century because of human activities. This neurotoxic negatively impacts animals’ health and induces behavioral changes, reproduction issues and in the most extreme case, death. The marine environment is particularly sensitive to Hg, which incorporates the food chain (under is toxic and methylated form – MeHg) in which its concentration increases from one trophic level to the other (e.g. biomagnification process) and accumulates within organisms (e.g. bioaccumulation process). Hence, long-lived top predators like seabirds, found at the end of the food chain usually show some of the highest contamination to Hg. They are commonly and efficiently used as bio-indicators of the health of their environment. Most of the current knowledge about Hg contamination in Arctic seabirds focused on the breeding period during which Hg was found to spatially vary, with usually higher Hg concentrations in the Canadian Arctic. During this period, which represents a part of the year only, seabirds aggregate in colonies for reproduction where they are more easily accessible. However, at the end of this period, seabirds migrate to overwinter mostly in open seas, outside of the Arctic. A previous study on a little auk (Alle alle) population breeding in East Greenland found that Hg concentrations were higher during the non-breeding period than during the breeding period, with carryover effects on the following reproduction. In the present doctoral work, based on a multi-species and multi-colony approach, we studied winter Hg exposure and the role of seabird migration in their contamination to Hg at large spatial scale. We found a seasonality in Hg concentrations allowing us to extend the results found in little auks to several species and at a larger spatial scale. We also found that this seasonality was spatially different with some of the highest variations for seabirds breeding in the West Atlantic (West Greenland and Canadian Arctic). We therefore proposed that such variations were due to seabird’s migration and the areas they overwintered at. To test such hypotheses, we used seabirds as bio-indicators of winter Hg contamination through the North-Atlantic Arctic. More specifically, we combined Hg measurements with geolocators devices to track the spatial origin of winter Hg contamination. We found an east-west increase in Hg concentrations allowing us to extend the results found during the breeding period to the winter period, through the entire North-Atlantic Arctic marine region. Results of the present doctoral work allow us to conclude that beyond migration, seabird distribution during the breeding and non-breeding periods drive their contamination to Hg.
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