La monarchie constitutionnelle canadienne : une anomalie éthique selon la perspective de l'égalité des chances

Le Canada a comme système de gouvernance une monarchie constitutionnelle issue de son héritage britannique. Bien que ce système monarchique soit riche en tradition, stable et semble à nouveau redorer son blason d’antan avec la nouvelle génération d’héritiers (c’est-à-dire William, Kate et leurs jeun...

Full description

Bibliographic Details
Main Author: Bélanger, Clément
Format: Thesis
Language:French
Published: Université d'Ottawa / University of Ottawa 2017
Subjects:
Online Access:https://dx.doi.org/10.20381/ruor-20292
http://www.ruor.uottawa.ca/handle/10393/36012
Description
Summary:Le Canada a comme système de gouvernance une monarchie constitutionnelle issue de son héritage britannique. Bien que ce système monarchique soit riche en tradition, stable et semble à nouveau redorer son blason d’antan avec la nouvelle génération d’héritiers (c’est-à-dire William, Kate et leurs jeunes enfants) mondialement adorée, cette thèse tient à démontrer qu’une telle structure de gouvernance n’est plus conforme à la réalité politique, voire éthique, de la société canadienne moderne, telle qu’analysée par le philosophe canadien James Tully. Ce professeur de pensée politique à l’Université de Victoria élabore une philosophie et une pratique post-impériales du constitutionalisme qui serviront de prémisses à cette thèse. L’enjeu éthique en est un de droits fondamentaux, de justice sociale et d’égalité : un citoyen canadien ne peut occuper la plus haute fonction gouvernementale de son propre pays, soit celle de chef d’État du Canada. Il s’agit d’une situation inacceptable car elle prive un citoyen de l’accès à la charge publique la plus importante de sa Nation. Cette situation est d’autant plus insoutenable car cela fait en sorte que l’institution même de chef d’État évoque une inégalité dans sa forme la plus absolue, qui va à l’encontre du projet émancipateur de reconnaissance et d’inclusion de l’être-ensemble canadien. James Tully offre une forme de constitutionnalisme qui consiste à concilier des demandes de reconnaissance grâce à des dialogues guidés par des conventions constitutionnelles communes. Cette approche est intéressante car elle offre la possibilité de résoudre des enjeux ancrés dans l’histoire de notre pays et ainsi trouver un terrain d’entente sous un nouvel éclairage. Pour ce faire, le philosophe canadien utilise entre autres un outil symbolique très puissant : L’Esprit de Haïda Gwaii. Cette extraordinaire œuvre d’art du sculpteur Bill Reid sera au cœur de l’argumentaire contre la monarchie constitutionnelle. Pour appuyer les perspectives offertes par Tully, les théories de l’illustre philosophe américain John Rawls, développées dans ses deux grands ouvrages, Théorie de la Justice (A Theory of Justice), et Libéralisme politique (Political Liberalism), seront aussi mis à profit pour démontrer que la réalité constitutionnelle héritée de l’époque de l’impérialisme européen ne correspond plus à la réalité éthique canadienne du 21e siècle. La vision rawlsienne de l’égalité des chances, qui découle du libéralisme, illustre bien qu’une monarchie héréditaire à la tête de l’État canadien n’est plus compatible avec les valeurs fondamentales de respect de la dignité de chaque individu et des libertés de base auxquelles ont droit tous les citoyens du Canada. Il s’agit ensuite de prendre cette prémisse et de la transposer à une théorie sociologique de l’éthique afin de démontrer que la visée morale dont il est question doit s’accompagner d’une institutionnalisation qui reflète à part entière le projet universaliste d’égalisation et de justice sociale. Il existe présentement un important décalage entre l’élitisme, le népotisme et le colonialisme, que représente la monarchie constitutionnelle face au projet de vivre-ensemble dans lequel la population canadienne pourrait pleinement se réaliser sans discrimination. Il faut se rappeler que c’est au nom du roi (ou de la reine) que les colons français et britanniques sont venus s’établir ici. Ils avaient tous une allégeance et un lien de fidélité au souverain. Bref, si à une époque lointaine l’institution de la monarchie servait à élever le peuple et exhortait une fierté nationale, cette même institution vient maintenant bafouiller les notions modernes de l’inviolabilité de la personne, des droits fondamentaux, ainsi que des valeurs de respect mutuel et de réciprocité dans une société pluraliste comme celle du Canada. Sur la base des théories de Tully et de Rawls, cette institution n’a plus sa place dans le projet identitaire et éthique canadien du 3e millénaire.